BIENVEILLANCENon classé

Cet élève « mal élevé »

Dans les écoles, certaines phrases reviennent souvent, parfois par fatigue, parfois par incompréhension : « il est mal élevé », « il cherche les limites », « il provoque ». 

Pourtant, derrière certains comportements difficiles, se cache parfois une réalité bien plus complexe : celle d’une maladie invisible, vécue par l’élève lui-même ou par un membre de sa famille.

Parler de maladie invisible à l’école, ce n’est pas excuser les comportements, mais apprendre à les comprendre autrement. C’est aussi interroger notre regard éducatif et notre manière de prévenir les situations de tension, voire de harcèlement.


Les maladies invisibles : une réalité souvent méconnue à l’école

On appelle maladies invisibles des troubles ou situations de santé qui ne se voient pas immédiatement mais qui ont un impact réel sur le quotidien. Il peut s’agir de troubles neurodéveloppementaux, de troubles anxieux, de douleurs chroniques, de troubles du sommeil, de pathologies psychiques ou encore de situations familiales lourdes liées à la maladie d’un parent.

Ces réalités restent souvent silencieuses, par pudeur, par discrétion ou parce qu’elles sont difficiles à expliquer. Pourtant, elles influencent profondément la disponibilité émotionnelle et cognitive de l’enfant. Fatigue, irritabilité, agitation, repli ou opposition peuvent alors apparaître, sans que l’enfant ne dispose des mots pour expliquer ce qu’il traverse.

Dans ce contexte, certains comportements interprétés comme un manque d’éducation sont en réalité des signaux de surcharge émotionnelle ou de vulnérabilité.


Quand le comportement devient un message

À l’école, le comportement est souvent la première chose visible. Mais il n’est que la partie émergée d’un vécu intérieur plus complexe. Un élève peut connaître les règles, vouloir bien faire, et pourtant ne pas réussir à s’y conformer lorsqu’il est envahi par le stress, l’inquiétude ou l’épuisement.

Dire qu’un élève est « mal élevé » revient parfois à figer une situation sans en comprendre les causes. Or un comportement n’est jamais une identité. Il est une réponse, souvent maladroite, à un contexte donné.

Dans une approche éducative fondée sur l’empathie, le comportement devient une information : il dit quelque chose de l’état interne de l’enfant. L’objectif n’est alors plus seulement de corriger, mais de comprendre ce qui se joue afin d’agir de manière plus juste et plus efficace.


Maladie invisible chez un parent : un impact souvent sous-estimé

La maladie invisible ne concerne pas uniquement l’élève. Lorsqu’un parent est malade, physiquement ou psychiquement, l’enfant peut vivre une charge émotionnelle importante. Inquiétude, fatigue, responsabilités précoces ou instabilité du quotidien influencent directement son comportement à l’école.

Ces enfants peuvent apparaître distraits, irritables ou en retrait, sans jamais verbaliser ce qu’ils traversent. Leur comportement devient alors un langage indirect, parfois déroutant pour les adultes qui ne connaissent pas leur contexte familial.

Reconnaître cette réalité permet d’éviter les jugements hâtifs et d’installer une posture plus ajustée, faite d’écoute et de prudence.


Empathie et cadre : une alliance nécessaire

Prendre en compte les maladies invisibles ne signifie pas renoncer aux règles ni à l’exigence. Le cadre reste essentiel pour sécuriser les élèves. Mais ce cadre gagne à être porté par une posture empathique, qui distingue la personne de son comportement.

L’empathie éducative consiste à maintenir des limites claires tout en tenant compte des fragilités possibles. Elle permet d’ajuster les réponses, d’offrir du temps, de verbaliser les émotions et, lorsque c’est nécessaire, de travailler la réparation plutôt que la sanction.

Cette approche favorise un climat scolaire plus apaisé et renforce la relation de confiance entre adultes et élèves.


Prévenir le harcèlement par la compréhension

Les recherches et les pratiques éducatives montrent que la prévention du harcèlement passe aussi par le développement des compétences socio-émotionnelles. Apprendre à reconnaître les émotions, à comprendre le point de vue de l’autre et à mesurer l’impact de ses actes constitue un levier puissant de prévention.

Lorsque l’école valorise l’empathie, la prise de perspective et la responsabilisation, elle agit en profondeur. Elle réduit les mécanismes de stigmatisation et encourage des relations plus respectueuses, plus conscientes et plus solidaires. Vous retrouverez un article à ce sujet ici: L’empathie dans les programmes scolaires : un levier fort pour prévenir le harcèlement.


Changer de regard pour mieux accompagner

Dire « cet élève est mal élevé » ferme souvent la porte à la compréhension. Dire « cet élève vit peut-être quelque chose de difficile » ouvre un espace de réflexion et d’accompagnement.

Cela ne signifie pas tout tolérer, mais accepter que derrière certains comportements se cachent parfois des réalités invisibles. En changeant de regard, l’école devient un lieu où l’enfant peut être vu dans sa globalité, avec ses forces, ses fragilités et son potentiel.


Reconnaître l’existence des maladies invisibles à l’école, c’est faire un pas vers une éducation plus juste et plus humaine. C’est rappeler que l’empathie n’est pas un luxe, mais un outil fondamental de prévention, de compréhension et de relation.

Former à l’empathie, c’est permettre aux enfants de grandir dans un environnement où ils peuvent apprendre, se tromper, réparer et évoluer sans être réduits à une étiquette.


En savoir plus sur Ecole Positive

Subscribe to get the latest posts sent to your email.

Laurie

Enseignante & créatrice de SereNest

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.