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L’impasse de la punition à l’école

Les pratiques punitives sont très fréquentes en milieu scolaire comme nous le révèle le livre d’Éric Debarbieux « L’impasse de la punition à l’école » en partageant des statistiques inédites.

31% des élèves de primaire affirment avoir été punis en moyenne 1 à 2 fois.

12% de 3 à 4 fois.

La nature de ces punitions se répartit ainsi.

© »L’impasse de la punition à l’école » d’Éric Debarbieux

Au collège, ce sont 2/3 des élèves qui affirment avoir subi une punition (46,2% ont écopé d’une retenue).

Notons, fait primordial dans le débat, que les punitions sont « genrées ». Elles touchent particulièrement les garçons…

Pourtant les textes officiels (dont celui du 2 juillet 1890) stipulent que :

« Les punitions auront toujours un caractère moral et réparateur. Le piquet, les pensums, les privations de récréation, sauf l’exception des retenues du jeudi et du dimanche prévues à l’article suivant, la retenue de promenade, sont formellement interdits. La mise à l’ordre du jour, comme peine disciplinaire est supprimée. »

Et que les châtiments corporels sont interdits depuis 1795.

QUID de l’efficacité des punitions ?

Sentiment d’injustice

Le premier point à prendre en compte est le sentiment d’injustice. Par exemple, près de 30% des collégiens punis se sont sentis injustement traités. Et 15,6% très injustement traités. Ce sentiment d’injustice n’est pas moteur dans une modification de comportement.

Punition et sexisme

« Le problème reste bien que répondre à la violence par la seule répression, par une inflation punitive ne résout pas le problème mais l’augmente et en particulier augmente la construction viriliste à la base de ces violences. »

Les garçons, majoritairement plus punis que les filles, développent leur virilité en étant punis à répétition. Pour faire image disons que « plus je suis puni, plus j’en ai ». Sylvie Ayral parle de « médailles de virilité » que seraient les sanctions. Elle précise : « la sanction consacre ce qu’elle prétend combattre : une identité masculine caricaturale qui s’exprime par le défi, la transgression, les conduites sexistes, homophobes et violentes ».

Le taux de punition amplifie donc l’identité de « mauvais élève », de « rebelle ».

Les enseignements de la discipline positive

Ce constat est à compléter par le travail de Jane Nelsen (Discipline Positive) et l’analyse d’Isabelle Filliozat qui évoquent la punition dans le cadre éducatif global (maison et école).

Selon Isabelle Filliozat, les punitions sont inefficaces car :

  • Elles s’adressent aux symptômes, et non aux causes des problèmes. Et rien que pour cela, chacun devrait les éviter. Comme le problème ne sera pas résolu, il ne manquera pas de se manifester à nouveau par d’autres comportements déviants, entraînant fatalement une escalade.
  • Elles évitent à l’enfant de faire face aux conséquences de ses actes et donc l’éloignent du sentiment de responsabilité. Comme l’enfant « paye » par la punition, il se vit comme exonéré de la faute, et ne s’y attarde donc pas davantage.
  • Les émotions causées par la punition stimulent le circuit de stress et empêchent l’enfant de réfléchir à ce qu’il a fait. La mémoire fonctionne, oui, mais l’enfant mémorisera le stress, la crainte, la colère, et non pas ce qui aura déclenché la punition.
  • Les punitions n’enseignent que la peur du gendarme et non pas responsabilité et autodiscipline. Elles empêchent la prise de conscience des conséquences de l’acte commis en détournant l’attention de l’enfant vers des sentiments négatifs à l’égard du parent : sentiment d’injustice, colère, crainte…
  • Elles font honte à l’enfant et donc bloquent plus encore le processus sain du sentiment de culpabilité qui aurait permis de prendre conscience de l’acte commis au profit du sentiment d’être mauvais en tant que personne. Lequel sentiment n’apportera bien évidemment aucun progrès.
  • Elles altèrent l’attachement et la confiance dans la relation parent-enfant, enseignant-enfant, et « vident » le réservoir de l’enfant, posant ainsi les conditions d’un nouveau dépassement de bornes.
  • La peur et la honte engendrées par les punitions inhibent les fonctions cérébrales supérieures, ce qui a un impact sur les performances intellectuelles, la vie émotionnelle et la socialisation.
  • Les parents/enseignants punissent parce qu’ils sont dépassés et impuissants. L’enfant le perçoit et perd confiance en ses parents, cela l’insécurise, et cette insécurité se manifestera par davantage de comportements déviants.
  • Le parent/l’enseignant perd de l’autorité progressivement, d’une part parce que l’enfant finit par se protéger de ses sentiments désagréables par un « Je m’en fiche » et d’autre part parce que, du fait de leur inefficacité sur le moyen et long terme, les punitions doivent être de plus en plus sévères. Punir n’est pas manifester son autorité. Nous punissons par manque d’autorité !
  • De plus, les punitions étant souvent infligées sous le coup de l’exaspération, elles sont souvent irrationnelles, disproportionnées et sans rapport avec le comportement problème.

Jane Nelsen (Discipline positive) retient quant à elle les 4 R de la punition :

Rancoeur : « C’est pas juste. Je ne peux pas faire confiance aux adultes. »

Revanche : « Bon, là, c’est eux qui gagnent, mais je les aurai la prochaine fois. »

Rébellion : « Je vais faire exactement l’inverse pour leur prouver qu’ils ne peuvent pas m’obliger à faire ce qu’ils veulent. »

Retrait : « La prochaine fois, je ne me ferai pas prendre. » Baisse de l’estime personnelle : je ne vaux rien.

Comment remplacer la punition ?

Le livre d’Éric Debarbieux est une mine d’or pour celles et ceux qui souhaitent s’inspirer de solutions alternatives éprouvées pour remplacer la punition.

On retiendra que les pratiques citées visent plutôt au renforcement du sentiment d’attachement au groupe en passant par la valorisation des individus et le respect mutuel.

Discipline positive

La discipline positive s’appuie sur 5 critères :

  1. Elle aide l’élève à développer le sentiment d’être en lien (appartenir et contribuer)
  2. Elle s’appuie sur la notion de respect mutuel et d’encouragement
  3. Elle enseigne les compétences sociales, émotionnelles et civiques utiles pour soi et pour le collectif
  4. Elle se veut efficace à long terme
  5. Elle invite l’élève à découvrir ce dont il est capable

Concrètement, et en guise d’exemple, il s’agira de poser un cadre ferme et bienveillant en coopération avec les élèves avec des lignes de conduite, des responsabilités, des rituels.

On axera aussi l’observation sur les forces des élèves en utilisant les encouragements en les distinguant des compliments.

© »L’impasse de la punition à l’école » d’Éric Debarbieux

La Communication NonViolente

Autre pratique aidante pour remplacer les punitions : la CNV (Communication NonViolente)

Cette discipline créé par Marshall Rosenberg se base sur la compréhension et la prise en compte des besoins fondamentaux de l’être humain.
Dans les fait, elle a un impact sur :

  • la manière de vivre les relations, de s’exprimer, d’écouter,
  • la manière de gérer les conflits,
  • la gestion des groupes, la pédagogie,
  • le management de l’établissement,
  • la conception et l’aménagement des lieux.

Concrètement il s’agira de remplacer nos habitudes nocives au profit d’autres habitudes qui contribuent à la prévention de la violence.

© »L’impasse de la punition à l’école » d’Éric Debarbieux

Conclusion :

Le livre d’Éric Debarbieux « L’impasse de la punition à l’école » est un ouvrage aussi intéressant que pratique. En dressant un panorama actuel de la présence « historique » de la punition, il permet de changer de paradigme et nous fournit des pistes d’action pour faciliter l’apprentissage des élèves, améliorer le bien-être des enseignants tout en repoussant la violence et le stress.

Ces pistes sont d’ailleurs aussi applicables à la maison.

« L’impasse de la punition à l’école » est disponible sur :


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