BIEN-ÊTRE

Le cerveau de l’enseignant : quand la sur-sollicitation est invisible

On parle beaucoup du cerveau de l’élève.
Rarement de celui de l’enseignant.

Dans les discours sur l’école, l’attention, les émotions et les apprentissages, le cerveau de l’élève est largement étudié. Pourtant, un autre cerveau est mobilisé en permanence, souvent jusqu’à l’épuisement : celui de l’enseignant.

Car enseigner aujourd’hui, ce n’est pas seulement transmettre des savoirs.
C’est gérer simultanément des dizaines de micro-décisions, d’émotions et d’interactions, sans véritable temps de récupération cognitive. Cette sur-sollicitation constante a un impact réel sur le fonctionnement du cerveau, même si elle reste largement invisible.

Un multitâche permanent

Contrairement à une idée reçue, le cerveau humain n’est pas fait pour le multitâche. Pourtant, le métier d’enseignant impose un enchaînement continu d’actions mentales : expliquer une consigne tout en surveillant le groupe, répondre à une question individuelle en anticipant un possible conflit, gérer le temps tout en régulant ses propres émotions.

Ce va-et-vient incessant entre attention, vigilance et adaptation mobilise fortement les fonctions exécutives. Il en résulte une fatigue exécutive peu visible de l’extérieur, mais extrêmement coûteuse sur le plan mental.

Des décisions qui ne s’arrêtent jamais

Tout au long de la journée, l’enseignant prend des décisions, souvent en quelques secondes : intervenir ou laisser faire, reformuler ou non, accompagner ou sanctionner, avancer ou ralentir le rythme. Ces choix, parfois anodins en apparence, s’accumulent sans pause.

Cette charge décisionnelle continue épuise progressivement les ressources cognitives, de manière comparable à ce que vivent les élèves en situation de stress. À une différence près : l’enseignant, lui, ne peut pas « mettre son cerveau sur pause » entre deux temps.

Une charge émotionnelle silencieuse

À cette sollicitation cognitive s’ajoute une charge émotionnelle. Accueillir les émotions des élèves, contenir les tensions, gérer les conflits, soutenir des enfants en difficulté, répondre aux attentes institutionnelles et parentales… tout cela se fait souvent sans espace de dépôt ni reconnaissance.

Cette dimension du travail, décrite notamment par le psychologue du travail Christophe Dejours, pèse lourdement sur l’équilibre psychique des professionnels, précisément parce qu’elle est peu nommée et rarement prise en compte.

Fatigue cognitive et fatigue physique : deux réalités différentes

Beaucoup d’enseignants le disent ainsi :

« Je ne suis pas fatigué physiquement, mais vidé mentalement. »

Il s’agit d’une fatigue cognitive, liée à la saturation des ressources attentionnelles et émotionnelles. Elle se manifeste par de l’irritabilité, une perte de patience, des difficultés à récupérer, ou ce sentiment diffus de « ne plus avoir de marge ». Des institutions comme l’OMS et l’OCDE alertent aujourd’hui clairement sur le lien entre surcharge mentale, stress chronique et risque de burnout chez les enseignants.

Prendre soin du cerveau de l’enseignant, c’est prendre soin de l’école

Reconnaître la sur-sollicitation du cerveau enseignant, ce n’est ni se plaindre ni renoncer. C’est poser un regard lucide sur un métier exigeant et ouvrir la voie à davantage de prévention, d’auto-régulation et de soutiens adaptés.

Un enseignant dont le cerveau est préservé est plus disponible, plus stable émotionnellement et plus juste pédagogiquement.
Prendre soin du cerveau de l’enseignant, c’est ainsi aussi prendre soin de l’école.

On partage ?

Et toi, que fais-tu pour te ressourcer ?
Reconnais-tu tes signaux de fatigue mentale avant qu’ils ne s’installent durablement ?


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Laurie

Enseignante & créatrice de SereNest

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